chaos is a ladder — Soa

I am not throwing away my shot

Soa est aérienne, prompte à se jouer des entraves physiques qui l'entouraient, maître de son corps et de ses propres peurs, une attitude à la fois désinvolte et débordante d'énergie qui lui confèrent un charisme difficilement exprimable. Elle a appris à se rendre indéchiffrable au fil des années. Ne jamais montrer de faille, ou l'ennemi saura s'en servir.

Sa principale faiblesse, c'est l'ambition ; l'ambition qui la dévore depuis le plus jeune âge et qui ne cesse d'augmenter au fil des années, le désir de prouver quelque chose au monde. Elle est prête à tout, même à s'exposer aux plus grands dangers, pour pouvoir gravir l'échelle sociale. Pour l'instant, elle a essuyé plus d'échecs que de victoires, le dernier étant le plus humiliant d'entre tous ; suite à la capture de sa bande de mercenaires, elle se retrouve à devoir accomplir des basses besognes et assassinats pour une femme qu'elle n'a jamais rencontrée.
Ses plans sont tous aussi ambitieux et déments les un que les autres, et certains murmurent même qu'elle a une bonne étoile pour ne pas être morte à cette âge-là. Mais tous s'accordent à dire qu'elle fait du très bon boulot.

Soa n'est pas, humainement parlant, une très bonne personne. L'honneur est un fardeau pour elle, et ne signifie rien, puisque la loyauté s'achète. La possession matérielle fait le pouvoir. Et ce n'est qu'une fois le pouvoir acquis qu'elle se sentira en sécurité. Elle veut pouvoir compter, et être maître de sa propre vie. Elle n'apprécie pas qu'on la contredise, et n'aime travailler qu'avec les gens qu'elle estime (donc avec une poignée de personnes encore plus petite que la dignité de Valerio). La plupart du temps, elle se comporte de façon relativement désagréable et égoïste, même si elle ne s'en rend pas toujours compte. C'est tout de même une personne décente, qui rechigne à faire souffrir inutilement, même si ce n'est pas un modèle de loyauté. Elle s'attache à de rares personnes, pour qui elle serait capable de remuer ciel et terre.

Sur la question de la religion et des mages, elle a été éduquée traditionnellement dans le culte des deux Dieux, mais elle se sent de plus en plus attirée par le dieu du vent, Sora. Elle n'a rien contre les mages en principe, bien qu'elle estime le concept d'Inquisition nécessaire.

As I'm stalked by the shadow of death's hand
Acre, ou le Village des Morts, n'avait jamais si bien porté son nom. La plupart des arbres de l'entrée - car on ne s'aventurait pas au-delà - étaient ornés de carcasses pendantes et striées de coups de couteau. La plupart, honteusement, dévoilaient un coup de main mal habile et hésitant à faire frémir un charcutier. L'ambiance morbide ne changeait rien pourtant à la volonté de Soa qui s'évertuait à supporter ce qu'elle estimait être de la contre-pédagogie pour prendre ce mouvement de main si net et rapide qu'on espérait lui voir accomplir, sous le regard patient mais dur de Salem. Ces moments-là d'ailleurs, n'étaient pas les pires lorsqu'elle considérait ceux où privée d'un ou deux de ses sens, elle devait parcourir des distances qui lui semblaient encore faramineuses, chargée de ce qui lui paraissait dix fois son poids.
L'entraînement se poursuivit comme de coutume, sans modifications ni surprise excepté l'évidence qui s'imposait à elle: être meilleure que la veille et moins accomplie que le lendemain.

Personne au sein du clan ne savait que ses parents étaient des membres de la Guilde des Marchands, bien que l'incendie qui avait ravagé la maison familiale cinq ans plus tôt ait fait parler de lui ; personne n'avait jamais fait le lien, assumant que l'unique fille des Visrin avait péri carbonisée avec ses parents dans ce tragique incident. Deux bougies « malencontreusement » renversées par une gouvernante, et tout un manoir qui prend feu. Malgré ses sept ans, Soa retint la leçon : que vous soyez haut placé ou que vous viviez parmi les rats, vos rivaux voudront toujours votre peau. Ceux de ses parents avaient manifestement réussi. La fabrique de soie du clan était revenue à l'un de ses lointains cousins, avait-elle entendu dire quelques semaines plus tard. Elle ? Elle avait fui où elle le pouvait, et c'était un membre du clan Nasrin qui l'avait prise sous son aile. En effet, qui d'autre pourrait être mieux conscient de ce qui pourrait arriver à une petite fille seule dans les Chausse-trappes ?

Le puissant clan Nasrin, brigands, forbans, trafiquants et assassins. La crème de la crème de la société Mukeshin. Salem lui avait ouvert les portes de cet univers, bien qu'elle restât une complète étrangère.
Soa n'ouvrait la bouche qu'en de rares occasions, se contentait de rester derrière son mentor, bien satisfaite de sa condition d'apprentie et surtout désireuse de ne pas faire de vagues. La petite accomplissait toutes sortes de sales boulots, parfois aidant des membres du clan dans des cambriolages de plus grande envergure.

Salem Nasrin était un homme de peu de mots, et la raison pour laquelle il l'avait prise sous son aile restait un mystère. Elle se prenait cependant à songer que cela n'était pas sans rapport avec la perte de sa petite soeur quelques années plutôt.
Une cicatrice qu'il avait réussi à combler en la recueillant, semblait-il.

Soa grandit rapidement, et tout aussi rapidement son corps de jeune adolescente devenait trop grand pour se faufiler dans certains passages et allées, trop encombrant pour courir aussi rapidement qu'elle ne le pouvait en étant enfant. C'était l'une des cambrioleuses les plus efficaces du clan, car fine et agile. Mais un tel succès ne pouvait qu'attiser les jalousies.

Soa et Setim, l'un des fils des pontes du clan, étaient rivaux depuis le plus tendre âge, mais il se s'agissait pas d'une rivalité amicale. La jalousie et l'antipathie mutuelle motivait les deux adolescents, et elle n'avait fait que grandir à mesure que les années passaient, les deux enfants redoublant d'efforts pour être plus fort que l'autre. Mais Setim savait. Il savait que jamais on n'accepterait Soa au sein du clan. Parce qu’elle était trop jeune, parce qu’elle était une fille.
C'est durant une nuit sans lune que Setim décida d'aller la coincer dans une rue, seul. Après s'être occupé d'elle, il la mettrait dans une des maisons de passe des Chausse-Trappes. Et il serait enfin débarrassé de cette intruse.

Malheureusement, tout ne se passa pas exactement comme il l'espérait.
On retrouva le corps de Setim dans une allée quelques heures plus tard.
Et aucune trace de Soa.